Dans notre culture, les émotions sont souvent jugées, classées, voire réprimées. Nous avons appris à penser et à agir, mais rarement à sentir. Pourtant, elles constituent une dimension fondamentale de notre humanité : elles nous renseignent sur nos besoins profonds et orientent nos comportements. Lorsqu’elles sont niées ou refoulées, elles laissent des traces dans le corps et dans nos relations.
Les émotions sont portées par des messagers chimiques qui influencent à la fois nos fonctions physiologiques et nos capacités cognitives. Une émotion non accueillie perd son rôle d’alerte et tend à s’amplifier. Elle peut alors créer des réactions disproportionnées, comme si l’organisme empruntait toujours les mêmes autoroutes neuronales. À force d’accumulation, ces émotions enfouies finissent par constituer un « réservoir » sous pression, prêt à exploser à la moindre déstabilisation, notamment dans la sphère relationnelle. Elles peuvent aussi s’imprimer dans le corps et se traduire par des tensions, des douleurs ou des troubles digestifs, respiratoires ou cardiaques.
Et si nous adoptions une hygiène émotionnelle, au même titre que l’hygiène corporelle ou alimentaire ? Accueillir nos émotions, leur donner un espace d’expression, c’est apprendre à se laisser traverser par elles plutôt qu’à les contenir. Une émotion pleinement reconnue dure rarement plus de 90 secondes. Ce qui l’alourdit, c’est le récit mental qui l’accompagne et la transforme en sentiment persistant.
C’est ici que l’olfaction peut jouer un rôle clé. Contrairement aux autres sens, l’odorat est relié directement au système limbique, siège des émotions et de la mémoire affective. Une odeur nous reconnecte immédiatement à notre vécu corporel, déclenchant parfois des larmes ou des sensations viscérales avant même que le mental n’intervienne. Elle peut devenir une porte d’accès précieuse à notre météo intérieure : que se passe-t-il en moi aujourd’hui ? Quelle émotion non exprimée cherche à se manifester ?
Au quotidien, sentir une odeur peut être un rituel simple d’écoute et de régulation émotionnelle. En mettant des mots, du mouvement ou de la créativité sur ce ressenti, on libère l’espace intérieur pour retrouver plus d’harmonie.
Dans un cadre thérapeutique, l’olfaction permet d’aller plus loin. L’olfactothérapie s’appuie non seulement sur des odeurs agréables et rassurantes, mais aussi sur des effluves parfois dérangeants. Ces derniers ouvrent l’accès à des mémoires profondes, parfois traumatiques. Accompagnée avec bienveillance, cette exploration aide à reconnaître, traverser puis pacifier les émotions enfouies, libérant peu à peu les schémas répétitifs qui freinent notre épanouissement.
Accueillir nos émotions grâce aux odeurs, c’est retrouver un lien sensible avec nous-mêmes. C’est faire de l’olfaction une véritable passerelle vers notre intériorité et transformer les émotions en boussole pour guider nos choix, nos relations et, finalement, notre chemin de vie.
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